«Paris et ses Jeux olympiques de 2024 : cent ans après, quel bilan et perspectives pour le bien-vivre ensemble ?» par Amadou Bal BA - Thieydakar
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«Paris et ses Jeux olympiques de 2024 : cent ans après, quel bilan et perspectives pour le bien-vivre ensemble ?» par Amadou Bal BA –

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Les Jeux olympiques d’été, la 33ème olympiade, auront lieu à Paris du 26 juillet 2024 au 11 août 2024, 10 500 athlètes ; plus de 3 millions de visiteurs attendus. Les Jeux Paralympiques et 549 épreuves, avec 4 400 athlètes, sont programmés du 28 août au 8 septembre 2024. Les principaux sites des JO sont : les Aréna de Bercy, de Champs de mars, de Paris Nord, de Paris Sud, de Porte La Chapelle, le Centre aquatique, le centre national de tir de Châteauroux, le Château de Versailles, la colline d’Élancourt, le Grand Palais, l’Hôtel de ville de Paris, les Invalides, la Concorde, le Golfe national, la Marina de Marseille, le Stade du Parc des Princes, Paris La Défense Aréna, le pont Alexandre III, le Site d’Escalade du Bourget, le Stade BMX de Saint-Quentin-des-Yvelines, le Stade de Bordeaux, le Stade de France, le Stade de la Beaujoire à Nantes, le Stade de Lyon, le Stade de Marseille, le Stade de Nice, le Stade Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne, le Stade nautique de Vaires-sur-Marne, le Stade Pierre Mauroy à Lille, Le Stade Roland Garros, le Stade Tour Eiffel, le Stade Yves-du-Manoir à Colombes, Teahupo’o, à Tahiti, pour le surf, au Trocadéro, le Vélodrome national à Saint-Quentin-en-Yvelines. Le village olympique se situe à Saint-Denis.

Les précédents JO avaient eu lieu à Paris 1924, la 8ème olympiade, du 4 mai au 27 juillet 1924, et le village olympique localisé à l’île Saint-Denis. C’est le baron Pierre de COUBERTIN (1863-1937), un Français, né à Paris et mort à Genève : «Le plus important aux Jeux olympiques n’est pas de gagner, mais de participer, car l’important dans la vie ce n’est point le triomphe, mais le combat ; l’essentiel, ce n’est pas d’avoir vaincu, mais de s’être bien battu», dit, le 24 juillet 1908, à Londres, lors d’un dîner, Pierre de COUBERTIN, dans son cosmopolitisme. Il est à la base des Jeux olympiques modernes, alors que ce projet, à l’époque, était soutenu par peu de personnes «Aux approches du Congrès, tout demeurait à raies de lumières, sur fond de gris» écrit le Baron de COUBERTIN dans ses «mémoires olympiques». Cependant, il avait initialement songé que les premiers jeux se tiennent à Paris, mais finalement se rallia à l’idée que l’Olympiade de 1896 ait lieu à Athènes «On me suivait presque sans discuter. Je fis voter successivement les principes fondamentaux arrêtés dans mon esprit : l’intervalle de quatre années, le caractère exclusivement moderne des concours, l’exclusion des scolaires, la désignation d’un Comité international permanent», écrit-il. En effet, un soir le vendredi 25 novembre 1892, il a rétabli, à la Sorbonne, les Jeux olympiques antiques de Grèce. «L’olympisme, à s’en séparer de l’âme, l’essence, le principe, des formes antiques qui l’avaient enveloppée et étaient depuis quinze cent ans descendues dans la tombe», écrit, «mémoires olympiques», Pierre de COUBERTIN. «Le siècle qui s’achève dans une paix troublée et incertaine, et dont le début fut marqué par des événements si sanglants, succédait à une époque de grande activité intellectuelle et de véritable inertie physique. Le sport ne peut, non seulement produire ses bons effets moraux, mais même subsister, que fondé sur le désintéressement, la loyauté et les sentiments chevaleresques. L’amateur antique luttait pour un simple rameau d’olivier sauvage et la loi excluait du concours les indignes, tous ceux dans la vie desquels il existait une tare quelconque. Nous ne sommes plus exposés à voir la passion du sang transformer l’arène et les bestialités du cirque remplacer les nobles spectacles du stade, mais il reste l’argent, le grand corrupteur, l’éternel ennemi !» dit Pierre de COUBERTIN, dans une plaidoirie pour le «rétablissement des JO» publiée dans la «Revue de Paris», du 15 juin 1894. En effet, Pierre de COUBERTIN a donné aux Jeux olympiques modernes une âme «philosophie de vie qui met le sport au service du développement harmonieux de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine. Les Jeux olympiques ne sont point de simples championnats mondiaux, mais bien la fête quadriennale de la jeunesse universelle», dit-il, le 25 novembre 1892, à la Sorbonne. «Combien sont-ils dans le monde ? Peu nombreux. Pierre de Coubertin est l’un de ceux-là. Un de ces hommes dont les dons, servis par une volonté, ont assuré le rapprochement des êtres humains. Sous le signe du perfectionnement à la fois du corps et de l’âme», écrit Jean DRAPEAU, dans l’avant-propos de la biographie sur Pierre COUBERTIN. «Pierre de Coubertin s’intéressa activement à l’éducation physique, à la formation intellectuelle et morale de l’adolescent. (…). Bien que son nom soit associé au renouveau de l’olympisme, Coubertin fut aussi un ardent partisan du sport pour tous» écrit dans la préface de la biographie, René MAHEU, Directeur général de l’UNESCO.

Je sais que chez ce peuple de «rouspéteurs», pour reprendre une formule du président Emmanuel MACRON, les JO de Paris divisent. Cette grande fête sportive a un coût financier, des nuisances et des perturbations de la vie quotidienne. Tout cela est exact. Cependant, les JO de 2024 sont un événement exceptionnel «Paris sera au rendez-vous en 2024, pour accueillir des jeux festifs, spectaculaires qui sauront faire rayonner notre pays, son art de vivre, sa créativité, son histoire, ses monuments, mais aussi et surtout ses citoyennes et ses citoyens», a dit Mme Anne HIDALGO, maire de Paris. Jadis, l’ancien maire, Bertrand DELANOE, dans sa grande probité, avait refusé toute compromission, dans cette compétition aux combinaisons parfois louches. Mme Anne HIDALGO n’a pas cédé non plus. La Ville de Paris dans son entêtement a fini, pour le centenaire, dans l’honneur et la dignité de gagner ces jeux.

Pour ma part, me définissant comme un «Parisien de Danthiady», ma capitale est une fête perpétuelle, un hymne à la joie, une quête quasi mystique de la vraie vie. «Si vous avez eu la chance de vivre à Paris quand vous étiez jeune, quels que soient les lieux visités par la suite, Paris ne vous quitte plus, car Paris est une fête mobile», dit Ernest HEMINGWAY (Voir mon article, Médiapart). La période du COVID-19, avait été un moment de solitude et de souffrance pendant le confinement et ce deuil planétaire, j’ai vibré de joie aux deux coupes du monde de football. La foule du 10 mai 1981 à la victoire de François MITTERRAND ainsi que celle du Bicentenaire de la Révolution française en 1989 m’ont laissé des joies et souvenirs impérissables. Je forme le vœu que le Centenaire des JO à Paris nous donne une nouvelle joie.

Et je ne comprends toujours pas la polémique nauséabonde de l’extrême droite voulant empêcher Aya NAKAMURA de chanter Edith PIAF aux JO de Paris (Voir mon article, Médiapart, 12 mars 2024). Aya NAKAMURA participer à la modernisation de la langue française, en y introduisant des mots et des concepts de la banlieue. Paul Laurence DUNDAR comme Langston HUGHES, de grands poètes afro-américains, ont mis de la couleur dans la poésie américaine. La France est déjà un pays multiculturel, c’est un combat perdu d’avance. On se bat pour écarter certaines grandes gloires françaises issues de la diversité, pour les empêcher d’être un porte-drapeau. Au fait, c’est quoi être Français à l’aube du XXIème siècle ?

Je songe à Alain MIMOUN, né Ali Mimoun Ould KACHA (1921-2013), est resté encore la seule médaille d’or du marathon aux JO de 1956, à Melbourne, médaille d’argent des 5000 mètres aux JO de 1952, une ancienne gloire du sport français, mais dont le nom est tombé dans l’oubli. «L’image la plus forte qui me restera toujours d’Alain Mimoun, celle qui m’a tellement marqué au début de ma jeune carrière d’athlète et pour la vie, c’est forcément l’arrivée d’Alain pour son dernier tour après 42,195 kilomètres de souffrance sous le soleil brûlant et la chaleur écrasante à Melbourne, en 1956. À l’époque, il n’y avait pas d’écrans géants et lumineux dans le stade olympique. J’attendais très excité, mais aussi un peu angoissé, l’arrivée d’Alain toujours en tête. Il a franchi le tunnel. Il était serein. Sa foulée dynamique. Il fonçait résolument vers la ligne et la médaille d’or. Une clameur gigantesque a déferlé vers lui. Un Français allait être champion olympique. C’était pour moi quelque chose d’autant plus fabuleux que j’avais partagé pendant six semaines son intimité. Mon corps soudain a été parcouru d’immenses frissons. C’était irréel», écrit Michel JAZY dans la préface «Alain Mimoun, une vie à courir». Alain Mimoun, «Son nom, celui d’un géant. De multiples images. Celles de sa vie au cœur de la famille de l’athlétisme français et de la famille olympique. Celles du personnage public qui a su conquérir le cœur des Françaises et des Français tout au long de sa vie», rajoute dans son introduction Bernard AMSALEM.

Que dire de Marie-José PEREC ? Née à Basse-Terre en Guadeloupe, Marie José est triple championne olympique d’athlétisme. Excusez du peu ! Elle n’a pas résisté à la pression de Sydney «Et la blessure la frappait au fond d’elle-même, mais aussi dans toutes les structures de son corps. Elle souffrait par où elle avait connu et mérité le cri que le monde entonne en l’honneur des héros et des héroïnes : ce corps qui n’a cessé de survivre aux efforts exigés de lui», écrit Edouard GLISSANT, dans la préface du livre de Marie José, «Rien ne sert de courir». En fait, l’Australie avide de réconciliation nationale souhaitait la victoire de Cathy FREEMAN, symbole de la cause aborigène.

Teddy RINER, judoka guadeloupéen des 140 kg, 2m04 est également un triple champion olympique.

Le sport est un puissant facteur pour rassembler les peuples. En cette montée grave des forces du Chaos, les européennes du 9 juin 2024 sont un moment décisif pour sauver la République. Je songe aux JO de 1936, à la propagande d’Adolphe HITLER voulant en faire un temps de promotion de sa politique aryenne. Jesse OWENS (1913-1980, voir mon article, Médiapart, 24 février 2021), un afro-américain, avait gâché la fête d’Adolphe HITLER, en remportant, aux JO de Berlin en 1936, quatre médailles d’or : le saut en longueur, 100 m, 200 m et relais quatre fois 100 m. C’est également un défi à l’Amérique empêtrée dans la ségrégation raciale et sûre de ses valeurs.

Usain BLOT, le jamaïcain, est le seul athlète à avoir conquis neuf médailles d’or olympiques. C’est non seulement un monument de l’athlétisme qui s’en va, mais c’est aussi le sauveur d’une discipline qui était en perdition (dopage, fraudes, corruption …) à son arrivée sur les pistes. Depuis des années, Bolt est la seule authentique star planétaire du premier sport olympique, un sport en crise qu’il a porté médiatiquement et économiquement sur ses épaules.

Je songe au marathonien éthiopien, Abebé BIKILA (1932-1973), mort à 41 ans, une vie courte, mais glorieuse. Il a été victorieux aux JO de 1960 et 1964. À Rome ; le coureur Abebe BIKILA a créé une immense surprise : il devint le premier médaillé d’or éthiopien et africain. Une fierté pour tout le continent.

Qui sont les grands favoris des JO ? Quelles surprises à venir ? Que la fête commence ! «Paris is a movable feast» ou «Paris est une fête», tel est le titre d’un roman d’Ernest HEMINGWAY.
Références bibliographiques très sélectives

BA (Amadou, Bal), «Aya Nakamura : chanteuse de la diversité aux JO de Paris de 2024», Médiapart, 12 mars 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Ernest Hemingway, Paris est une fête», Médiapart, 8 septembre 2018 ;

BA (Amadou, Bal), «Jesse Owens : le sport et l’égalité réelle», Médiapart, 24 juillet 2021 ;

BA (Amadou, Bal), «Vers une Europe identitaire : Son Pacte migratoire», Médiapart, 11 avril 2024 ;

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Paris, le 13 mai 2024, par Amadou Bal BA –

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