« La morsure », un premier film prometteur
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Romain de Saint-Blanquat signe un long métrage fantastique ancré dans une période transitoire de l’Histoire : 1967. Au programme : ésotérisme, passage à l’âge adulte, dialogues très écrits et images magnifiques.
Musique flippante à la Amytiville, lumière nébuleuse : l’ambiance est posée dès les premières minutes de La morsure. Dans un lycée catholique de jeunes filles en 1967 le mercredi des Cendres, Françoise fait un cauchemar dans lequel elle se voit brûlée vive.
Comme les autres filles du dortoir, elle a atteint ce moment charnière où l’enfance s’éloigne. Un âge où on est pétri d’angoisses, fasciné par la mort. Chez elle, les questions sur l’avenir sont résolues par le pouvoir supposé de son pendule. Le rêve l’a marquée, elle lui demande si elle survivra au lendemain. La réponse est non.
Brume, mystère et menace
Pour sa dernière journée, Françoise décide de quitter clandestinement le lycée avec sa meilleure amie Delphine pour participer à une fête organisée dans une maison bourgeoise par une bande de garçons. Il y aura de l’alcool, peut-être du sexe. Si Delphine est une fille certes jolie et qui a déjà une sexualité, Françoise se distingue par son mystère, une certaine sauvagerie, l’envie de tester les limites.
Pour se rendre à cette fête, elle aborde un inconnu dans un café. Maurice est atypique, vaguement désespéré, seul. Pour faire plaisir à la jeune fille, il vole un véhicule et les conduit dans le parc de l’imposante maison.
Brume, mystère, menace diffuse : tout ça n’a pas de prise sur Delphine qui tombe dans les bras de Daniel, le beau mec de service. Déçue, car elle voudrait avoir fait l’amour au moins une fois avant de mourir, Françoise comprend qu’elle a néanmoins séduit quelqu’un.
Grande cape noire, teint diaphane, regard un peu fixe Christophe n’est pas comme les autres garçons. Avec lui, Françoise ira jusqu’au bout de la nuit pour comprendre que sa fascination pour la mort est à coup sûr une déclaration d’amour à la vie.
Magnétique et changeant
« J’ai eu la chance de pouvoir composer un casting qui correspond vraiment à ma vision initiale » raconte le réalisateur Romain de Saint-Blanquat. « Pour Françoise, la comédienne devait pouvoir incarner les transformations du personnage, son intensité et sa spontanéité. Dans le film, Léonie Dahan-Lamort a quelque chose de magnétique et de très changeant, qui accompagne bien cette évolution », ajoute-t-il.
Avant de poursuivre : « Avec Lilith Grasmug, qui a enrichi le personnage de Delphine en lui donnant des nuances, Il y a quelque chose qui circule entre elles et permet de croire à leur amitié. Elle apporte une profondeur, mais aussi une dureté, qui diffèrent de celles de Françoise et qui permettent aux personnages de mieux se compléter que sur le papier. »
« Pour les rôles masculins, il fallait aussi que les comédiens puissent se compléter, en exprimant chacun une masculinité différente, avec une forte singularité. Dans le rôle de Christophe, Maxime Rohart avait la capacité d’y croire fortement tout de suite et il a su trouver le ton singulier du personnage », commente Romain de Saint-Blanquat.
« Pour Daniel, qui est dans une position un peu extérieure, Cyril Metzger était idéal pour s’inscrire un peu en décalage avec l’univers des autres personnages, en apportant une énergie et un ancrage très fort. Maurice cristallise les peurs de Françoise, vit hors des normes sociales et incarne une image de l’adulte différente de celle que connaissent les personnages. »
Avec ses dialogues très écrits, ses images aux lumières et couleurs fantomatiques, La morsure est un film d’auteur fascinant sur le passage à l’âge adulte. Il aborde aussi en creux le thème de la différence. Romain de Saint-Blanquat a étudié le cinéma à l’université à Bordeaux et Paris. Il travaille aussi comme décorateur, assistant de production et scénariste. La Morsure est son premier long métrage de ce lauréat de la fondation GAN : un bel avenir lui est promis.